La reprise est sensible mais le métier reste à renouveler

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Si reprise il y a, la question reste à en déterminer l’intensité dans une profession qui a de nombreux enjeux devant elle. Pierre-Yves Gérard reste prudent et surtout conscient que la crise traversée ces derniers mois, va laisser des traces au sein des exploitations. Explications

food&coffee markets : Les dernières semaines vous rendent-elles optimiste ? 

Pierre-Yves Gérard : La question de la reprise est à mon sens dans tous les esprits ! Et pour cause nous avons collectivement subi les affres de la fermeture des sites et des confinements. Fort heureusement cela semble derrière nous depuis quelques semaines et nous pouvons nous en réjouir. Pour autant rien n’est gagné car le Covid a d’ores et déjà des répercussions. Nous constatons en effet un défaut d’une partie de la clientèle qui aujourd’hui a pris des habitudes de consommations différentes sur le café comme par exemple les capsules Espresso. C’est un pan de notre clientèle qui pour le moment semble avoir trouvé des palliatifs au services proposés par la distribution automatique. Par ailleurs le télétravail aura à mon sens également un impact qu’il nous reste à observer et inclure dans nos futures modélisations

food&coffee markets : Comment interprétez-vous cette logique ?

P-Y.G. : Je crois qu’il faut raison garder. Dans un premier temps il nous incombe de chercher à retrouver nos fondamentaux. La distribution automatique et en ce qui concerne CEDAF s’est développée sur de la prestation de service en « province » avec des typologies de clientèles qui nous sont propres et régionales. Rien de péjoratif dans tout cela mais nous avons clairement une structure de clientèle différente des très grandes métropoles avec une multitude de clients de taille plus modeste ce qui influe sur notre mode de gestion et notre organisation interne. Si nous avons comme beaucoup de professionnels de la gestion constaté un recul de l’activité pendant les périodes Covid, il reste encore à constater les impacts durables de celles-ci sur l’activité. Si je pense que nous serons moins impactés par l’effet flexibilité du travail, nous devons néanmoins nous attendre à une perte de certains clients du moins à court terme. Cela nécessite de la patience et une attention quotidienne afin de pouvoir adapter notre outil opérationnel. 

food&coffee markets : Le vending est aujourd’hui en mutation ?

P-Y.G. : C’est une très bonne question qui nécessite de mettre le métier en perspective. Je viens du monde de l’informatique qui depuis les années 90 n’a cessé de connaître des évolutions en termes de matériels mais également de technologies avec des évolutions qui n’ont cessé de modifier les usages et d’accélérer l’obsolescence des solutions du moment. Avec la microinformatique, internet, les logiques de client-serveur puis le cloud, les investissements du moment pouvaient vite devenir « datés » ce qui impliquait une vraie agilité et des investissements permanents pour satisfaire les clients. Les enjeux étaient à la fois technologiques et bien entendu financiers. Aujourd’hui encore, la DATA ne cesse d’imposer un rythme d ‘adaptation et de mutation des organisations et mode de travail… le télétravail en est aujourd’hui la plus belle démonstration avec un vrai bond des usages et sur l’organisation de travail. Qui aurait pu penser il y a deux ans que la France allait pouvoir enjamber cet enjeu ? La distribution automatique répond à mon sens à une temporalité plus lente. Il n’y a pas eu à mon sens de mutation technologique forte ces trente dernières années mais des améliorations permanentes qui doivent nous permettre d’apporter une prestation de plus en plus qualitative à nos clients. Par contre les solutions alternatives et complémentaires, sont apparue comme la capsule espresso. Les usages ont évolué, de même que les attentes des consommateurs et donc les demandes de nos clients. Cela concerne le café avec la montée en puissance de l’expresso café grain par exemple mais également les demandes de produits plus sains, de collations plus équilibrées… mais ces évolutions tendances prennent du temps pour s’imposer. Les paiements sans contact par exemple sont de plus en plus présents et aujourd’hui le paiement bancaire sans contact (Covid oblige) est fortement demandé, cependant on ne peut pas encore parler de rupture car les usages, s’ils évoluent et nécessitent que nous les prenions en compte, ne créent pas encore de rupture a proprement dit. Le vending est une activité de cycle long ou il nous est demandé et c’est peut-être là à mon sens la vraie rupture, une prestation café/snack… de service, de plus en plus exigeante en termes de propositions et de réactivité. C’est là notamment que la digitalisation peut nous apporter des solutions opérationnelles concrètes dans nos schémas opérationnels. Reste néanmoins que nous sommes encore dépendants de la fracture numérique et de la possibilité de déployer de manière sécurisée ces solutions avec de l’internet haut débit, de la 4/5 G… Nous devons néanmoins prendre en compte les évolutions des usages et des tendances de consommation comme l’offre café & boissons gourmandes, la nutrition, l’environnement. Ce sont des sujets qui nous interpellent et qui doivent trouver une résonance au travers des réponses que nous, professionnels, devons être en mesure d’apporter. Le métier doit se renouveler mais nous restons sur une prestation de service avec des réalités économiques liées à notre mode d’exploitation actuel, à notre clientèle et nos territoires. Notre impératif est aujourd’hui de nous insérer dans un tissu économique local et d’apporter une prestation en phase avec la réalité des demandes qui nous sont exprimées localement. A l’heure actuelle notre priorité chez CEDAF reste de nous concentrer sur la reprise de l’activité et une adaptation aux impératifs nouveaux qui sont en train d’émerger suite au Covid, de retrouver nos clients et de leur apporter des réponses adaptées aux nouvelles réalités autour de la pause-café et détente au sens large.